Page:Constant - La Druidesse.djvu/18

Cette page n’a pas encore été corrigée


Roi de l’ombre et des morts, dieu des Cairns, écoute !
La nuit du jugement, que de barques, de voix,
Passent sous le Plogoff pour la funèbre route ;
Que d’âmes de vaillants Gaulois !
Ils sont tombés, tes fils, dans l’héroïque joute ;
Tombés pour tes autels, ô Dis, que l’on redoute,
Tombés pour ta patrie, et tombés pour tes lois.
Entends ; le cri du sang remplit la sombre voûte ;
Frappe l’intrus romain, montre ce qu’il en coûte
D’outrager tous nos droits !

O sublime Inconnu, Pouvoir saint et terrible,
Cause unique de tout, sans naissance et sans fin,
O dieu du chêne, Esus, vois le spectacle horrible :
Fut-il jamais plus noir dessein ?
Culte, forêt, druide, Esus, est-ce possible ?
Profanés et détruits ! N’es-tu plus l’invincible ?
Vers toi, vers ton séjour, où trouver le chemin ?
Peut-il donc, lé tyran, te rendre inaccessible ?
Qu’est le gui sans le chêne ? A nos maux sois sensible :
Écrase le Romain.

...................................................................
Mais la voix et l’accord se taisent sur les ondes.
O barde, qui t’arrête ? En ces ombres profondes
As-tu vu l’Inconnu que ta bouche a nommé ;
Ou bien, dans sa douleur reste-t-il abîmé
Le cœur de la Gauloise et de la druidesse ?
Le silence et l’horreur couvrent-ils ta détresse ;
Et devant ton malheur, as-tu perdu la voix ?
Silence, ô nuit ! L’accord vibre encore une fois !

Pauvre Bélisana, triste vierge de Sène,
Pourquoi faucille d’or, et ceinture d’airain ?