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A SA FAMILLE
93. A Mme la comtesse de Nassau, née de Chandieu.

Coppet, ce samedi 1803.

Je ne vous ai point écrit depuis ma course à Lausanne, ma chère tante, parce que j’attendais des nouvelles qui m’étaient nécessaires pour me décider sur mon retour dans mes propriétés et que je voulais, en vous écrivant, vous dire quelle serait ma marche. Ces nouvelles sont arrivées ; elles ont dissipé, comme je le prévoyais, tous les doutes que mes amis de ce pays-ci avaient bien voulu concevoir sur la parfaite convenance de mon séjour chez moi. Je ne perds donc pas un instant pour y retourner et il ne me reste de l’incertitude que l’intérêt de mes amis avait pu m’inspirer qu’une profonde reconnaissance pour cet intérêt. Ce n’est pas, tout certain que je suis de ma tranquillité complète, que je forme le projet de me rapprocher le plus vite possible du pays que vous habitez. Je n’ai pas besoin, chère tante, de vous dire que vivre avec vous et auprès de vous est mon désir le plus vif ; mais toutes mes affaires exigent ma présence au moins pour quelques mois et j’obéis à la nécessité. Je vous prie de ne point dire à Lausanne que je suis retourné chez moi. Je vous écrirai aussitôt que je serai dans ma retraite et j’espère bien que cette fois vous ne m’y tiendrez pas rigueur. Je vous ai dit combien vous risqueriez de me corrompre en craignant de me faire payer des ports de lettres et quel mauvais usage je ferais de l’argent que vous me laisseriez.

Ainsi, par pitié pour mes mœurs, écrivez-moi souvent.

Je ne sais si j’habiterai Paris ou ma campagne ; aussi je ne vous donne pas mon adresse et vous l’enverrai à l’instant même de mon arrivée.

Toutes les nouvelles d’aujourd’hui sont à la paix. J’ai lu la belle circulaire de votre Landamann contenant confirmation des impôts existants et promettant