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CHAPITRE XI

Point de vue sous lequel une nation conquérante
envisageroit aujourd’hui ses propres succès


Passons maintenant aux résultats extérieurs du système des conquêtes.

Il est probable que la même disposition des modernes, qui leur fait préférer la paix à la guerre, donneroit dans l’origine de grands avantages au peuple forcé par son gouvernement à devenir agresseur. Des nations, absorbées dans leurs jouissances, seroient lentes à résister : elles abandonneraient une portion de leurs droits pour conserver le reste ; elles espéreroient sauver leur repos, en transigeant de leur liberté. Par une combinaison fort étrange, plus l’esprit général seroit pacifique, plus l’État, qui se mettroit en lutte avec cet esprit trouverait d’abord des succès faciles.

Mais quelles seraient les conséquences de ces succès, même pour la nation conquérante ? N’ayant aucun accroissement de bonheur réel à en attendre, en ressentirait-elle au moins quelque satisfaction d’amour propre ? Réclameroit-elle sa part de gloire ?