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CHAPITRE III

De l’esprit de conquête dans l’état actuel
de l’Europe


Un gouvernement qui voudroit aujourd’hui pousser à la guerre et aux conquêtes un peuple européen, commettrait donc un grossier et funeste anachronisme. Il travailleroit à donner à sa nation une impulsion contraire à la nature. Aucun des motifs qui portoient les hommes d’autrefois à braver tant de périls, à supporter tant de fatigues, n’existant pour les hommes de nos jours, il faudrait leur offrir d’autres motifs, tirés de l’état actuel de la civilisation, il faudroit les animer aux combats par ce même amour des jouissances, qui, laissé à lui-même, ne les disposerait qu’à la paix. Notre siècle, qui apprécie tout par l’utilité, et qui, lorsqu’on veut le sortir de cette sphère, oppose l’ironie à l’enthousiasme réel ou factice, ne consentirait pas à se repaître d’une gloire stérile, qu’il n’est plus dans nos habitudes de préférer à toutes les autres. À la place de cette gloire, il faudroit