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CHAPITRE II

Du caractère des nations modernes
relativement à la guerre


Les peuples guerriers de l’antiquité devoient pour la plupart à leur situation leur esprit belliqueux. Divisés en petites peuplades, ils se disputoient à main armée un territoire resserré. Poussés par la nécessité les uns contre les autres, ils se combattoient ou se menaçoient sans cesse. Ceux qui ne vouloient pas être conquérans ne pouvoient néanmoins déposer le glaive sous peine d’être conquis. Tous achetaient leur sûreté, leur indépendance, leur existence entière au prix de la guerre.

Le monde de nos jours est précisément, sous ce rapport, l’opposé du monde ancien.

Tandis que chaque peuple, autrefois, formoit une famille isolée, ennemie née des autres familles, une masse d’hommes existe maintenant, sous différens noms et sous divers modes d’organisation sociale, mais homogène par sa nature. Elle est assez forte pour n’avoir rien à craindre des hordes encore barbares. Elle est assez civilisée pour que la guerre lui soit à charge. Sa tendance uniforme