Page:Constant - Adolphe.djvu/155

Cette page a été validée par deux contributeurs.

habitation éloignée une pâle lumière qui perçait l’obscurité. Là, me disais-je, là peut-être quelque infortuné s’agite sous la douleur, ou lutte contre la mort ; contre la mort, mystère inexplicable, dont une expérience journalière paraît n’avoir pas encore convaincu les hommes ; terme assuré qui ne nous console ni ne nous apaise, objet d’une insouciance habituelle et d’un effroi passager ! Et moi aussi, poursuivais-je, je me livre à cette inconséquence insensée ! Je me révolte contre la vie, comme si la vie ne devait pas finir ! Je répands du malheur autour de moi, pour reconquérir quelques années misérables que le temps viendra bientôt m’arracher ! Ah ! renonçons à ces efforts inutiles ; jouissons de voir ce temps s’écouler, mes jours se précipiter les uns sur les autres ; demeurons immobile, spectateur indifférent d’une existence à demi passée ; qu’on s’en empare, qu’on la déchire : on n’en prolongera pas la durée ! vaut-il la peine de la disputer ?