spoliation ne devient que plus indigne de ce qu’il ravit.
Plus d’une fois, durant nos troubles, nos maîtres d’un jour, qui nous entendaient regretter le gouvernement des propriétaires, ont eu la tentation de devenir propriétaires pour se rendre plus dignes de gouverner ; mais quand ils se seraient investis en quelques heures de propriétés considérables, par une volonté qu’ils auraient appelée loi, le peuple et eux-mêmes auraient pensé que ce que la loi avait conféré, la loi pouvait le reprendre ; et la propriété, au lieu de protéger l’institution, aurait eu continuellement besoin d’être protégée par elle. En richesse, comme en autre chose, rien ne supplée au temps.
D’ailleurs, pour enrichir les uns, il faut appauvrir les autres ; pour créer de nouveaux propriétaires, il faut dépouiller les anciens. L’usurpation générale doit s’entourer d’usurpations partielles, comme d’ouvrages avancés qui la défendent. Pour un intérêt qu’elle se concilie, dix s’arment contre elle.
Ainsi donc, malgré la ressemblance trompeuse qui paraît exister entre l’usurpation et la monarchie, considérées toutes deux comme le pouvoir remis à un seul homme, rien n’est plus différent. Tout ce qui fortifie la seconde menace la première ; tout ce qui est, dans la monarchie, une cause d’union, d’harmonie et de repos, est, dans l’usurpation, une cause de résistance, de haine et de secousses.
Ces raisonnements ne militent pas avec moins de force pour les républiques, quand elles ont existé longtemps. Alors elles acquièrent, comme les monarchies, un héritage de traditions, d’usages et d’habitudes. L’usurpation seule, nue et dépouillée de toutes ces choses, erre au hasard, le glaive en main, cherchant de tous cô-