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sagère, passionnée, remuable, qui chaque jour diminue en nombre, et dont la désastreuse puissance a dès longtemps été terrassée par ceux mêmes qu’aujourd’hui l’esprit de parti voudrait flétrir de ce nom : et l’on fait l’apologie d’un système, destructeur de sa nature, et contre lequel il n’y a rien à espérer, même des bienfaits du temps ! N’est-on donc implacable que pour les individus ? Si jamais de nouveaux terroristes, en quelque sens que ce fût, si les partisans d’une terreur royale, la seule, aujourd’hui, qui nous menace, se saisissaient de l’autorité, ils pourraient nous étaler les sophismes que l’on entasse, nous énumérer, d’après des auteurs célèbres, tous les heureux résultats de la terreur, et appuyer cette affreuse théorie sur les ouvrages mêmes de ceux qui s’en montraient naguère les plus ardents ennemis.

Je me propose de prouver que la terreur n’a pas été nécessaire au salut de la république ; que la république a été sauvée malgré la terreur ; la terreur a créé la plupart des obstacles dont on lui attribue le renversement ; que ceux qu’elle n’a pas créés auraient été surmontés d’une manière plus facile et plus durable, par un régime juste et légitime ; en un mot, que la terreur n’a fait que du mal, et que c’est elle qui a légué à la république actuelle tous les dangers qui, aujourd’hui encore, la menacent de toutes parts. (Cette démonstration n’est pas superflue. Nous ne manquons pas d’hommes qui, aujourd’hui encore, admirent, sinon le but, au moins l’énergie de Robespierre et de Marat. Ils voudraient que la monarchie, s’emparant d’une énergie semblable, frappât comme eux ceux qu’elle soupçonne. Prouvons donc à la monarchie que la terreur n’a pas servi, mais perdu le gouvernement républicain.)