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toyens ? J’aurais bien mauvaise opinion de la moralité ou du bonheur d’un peuple, si une telle garde nationale se montrait favorable à des rebelles, ou si elle répugnait à les ramener à l’obéissance légitime.

Remarquez que le motif qui rend nécessaire une troupe spéciale contre les délits privés ne subsiste pas quand il s’agit de crimes publics. Ce qui est douloureux dans la répression du crime, ce n’est pas l’attaque, le combat, le péril : c’est l’espionnage, la poursuite, la nécessité d’être dix contre un, d’arrêter, de saisir, même des coupables, quand ils sont sans armes. Mais contre des désordres plus graves, des rébellions, des attroupements, les citoyens qui aimeront la constitution de leur pays, et tous l’aimeront, puisque leurs propriétés et leurs libertés seront garanties par elle, s’empresseront d’offrir leur secours.

Dira-t-on que la diminution qui résulterait, pour la force militaire, de ne la placer que sur les frontières, encouragerait les peuples voisins à nous attaquer ? Cette diminution, qu’il ne faudrait certainement pas exagérer, laisserait toujours un centre d’armée, autour duquel les gardes nationales, déjà exercées, se rallieraient contre une agression ; et si vos institutions sont libres, ne doutez pas de leur zèle. Des citoyens ne sont pas lents à défendre leur patrie, quand ils en ont une ; ils accourent pour le maintien de leur indépendance au dehors, lorsqu’au dedans ils possèdent la liberté.

Tels sont, ce me semble, les principes qui doivent présider à l’organisation de la force armée dans un État constitutionnel.