lière, il a fallu une explication particulière. Une assertion pareille dans les journaux anglais n’aurait alarmé aucun des ordres qui existent en Angleterre. C’est que les journaux y sont libres et qu’aucune intervention de la police ne rend le gouvernement solidaire de ce qu’ils publient.
Il en est de même pour ce qui concerne les individus. Quand les journaux ne sont pas libres, le gouvernement pouvant empêcher qu’on ne dise du mal de personne, ceux dont on dit le plus léger mal semblent être livrés aux journalistes par l’autorité. Le public ignore si tel article a été ordonné ou toléré, et le blâme prend un caractère semi-officiel qui le rend plus douloureux aussi bien que plus nuisible. Ceux qui en sont les objets en accusent le gouvernement. Or, quelques précautions qu’entasse l’autorité, tout ce qui ressemble à des attaques individuelles ne saurait être prévenu. Les précautions de ce genre ne font, chez un peuple spirituel et malin, qu’inviter la dextérité à les surmonter. Si les journaux sont sous l’influence de la police, déconcerter la police par quelques phrases qu’elle ne saisit pas tout de suite sera une preuve d’esprit. Or, qui est-ce qui se refuse parmi nous à donner une preuve d’esprit, s’il n’y a pas peine de mort ?
Un gouvernement qui ne veut pas être tyrannique ne doit pas tenter la vanité, en attachant un succès à s’affranchir de sa dépendance.
La censure des journaux fait donc ce premier mal, qu’elle donne plus d’influence à ce qu’ils peuvent dire de faux et de déplacé. Elle nécessite dans l’administration un mouvement inquiet et minutieux qui n’est pas conforme à sa dignité. Il faut, pour ainsi dire, que l’autorité coure après chaque paragraphe, pour l’invalider, de peur qu’il ne semble sanctionné par elle. Si, dans un