Page:Constant - Œuvres politiques, 1874.djvu/244

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.



III


DE LA LIBERTÉ DE LA PRESSE.

Tous les hommes éclairés semblent être convaincus qu’il faut accorder une liberté entière et l’exemption de toute censure aux ouvrages d’une certaine étendue. Leur composition exigeant du temps, leur achat, de l’aisance, leur lecture, de l’attention, ils ne sauraient produire ces effets populaires qu’on redoute, à cause de leur rapidité et de leur violence. Mais les Pamphlets, les Brochures, les Journaux surtout, se rédigent plus vite : on se les procure à moins de frais ; ils sont d’un effet plus immédiat ; on croit cet effet plus formidable. Je me propose de démontrer qu’il est de l’intérêt du gouvernement de laisser même aux écrits de cette nature une liberté complète : j’entends par ce mot la faculté accordée aux écrivains de faire imprimer leurs écrits sans aucune censure préalable[1]. Cette faculté

  1. La censure préalable établie sous la Restauration était un legs de l’ancienne monarchie. Jusqu’en 1789, la pensée comme la croyance fut tenue dans un complet état de subordination. Tout en