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ne leur appartient pas[1], et qui a la police de leurs assemblées ; ils sont dirigés dans tous leurs actes par des règlements émanés d’une volonté étrangère ; ils sont choisis pour la vie, et néanmoins exposés à être dissous ; ils sont obligés de recevoir un dixième environ d’intrus, envoyés comme une garnison dans une place qu’on veut contenir. Ces colléges offrent-ils la moindre trace d’une origine nationale ? Permettent-ils la moindre espérance de liberté dans leur action ? Quand on contemplait ces deux cents hommes rassemblés dans une salle, et surveillés par vingt délégués du maître, on croyait voir des prisonniers gardés par des gendarmes, plutôt que des électeurs procédant à la fonction la plus imposante et la plus auguste.

Venons à la seconde partie de l’élection, ou plutôt à l’élection même qui se fait par le sénat.

Pour en juger impartialement, je citerai les propres paroles du défenseur le plus estimable de cette institution[2].

« Le peuple, dit-il, est absolument incapable d’approprier aux diverses parties de l’établissement public les hommes dont le caractère et les talents conviennent le mieux ; il ne doit faire directement aucun choix : les corps électoraux doivent être institués, non point à la base, mais au sommet de l’établissement ; les choix doivent partir, non d’en bas, où ils se font i toujours nécessairement mal, mais d’en haut, où ils se feront nécessairement bien ; car les électeurs[3] au-

  1. Je suis fâché de dire que cet inconvénient a encore lieu dans notre loi sur les élections.

    [Cet abus ne fut détruit qu’après 1830.] (Note de M. Laboulaye.)

  2. Considérations sur la Constitution de l’an VIII, par M. le sénateur Cabanis.
  3. C’est-à-dire le Sénat, nommé par l’empereur.
    (Note de M. Laboulaye.)