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prérogatives du gouvernement comme son héritage, et respecte ses moyens à venir dans ses adversaires présents. C’est un grand vice, dans une constitution, que d’être placée entre les partis, de manière que l’un ne puisse arriver à l’autre qu’à travers la constitution. C’est cependant ce qui a lieu, lorsque le pouvoir exécutif, mis hors la portée des législateurs, est pour eux toujours un obstacle et jamais une espérance.

On ne peut se flatter d’exclure les factions d’une organisation politique, où l’on veut conserver les avantages de la liberté. Il faut donc travailler à rendre ces factions les plus innocentes qu’il est possible, et comme elles doivent quelquefois être victorieuses, il faut d’avance prévenir ou adoucir les inconvénients de leur victoire.

Quand les ministres sont membres des assemblées, ils sont plus facilement attaqués, s’ils sont coupables ; car sans qu’il soit besoin de les dénoncer, il suffit de leur répondre : ils se disculpent aussi plus facilement, s’ils sont innocents, puisqu’à chaque instant ils peuvent expliquer et motiver leur conduite.

En réunissant les individus, sans cesser de distinguer les pouvoirs, on constitue un gouvernement en harmonie, au lieu de créer deux camps sous les armes.