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de sécurité pour l’avenir. Il eut foi dans leurs promesses, et quelques jours avant la promulgation de la Charte, il fit paraître une brochure dans laquelle il traçait le programme du gouvernement représentatif tel qu’il le voulait pour la France ; on l’accusa de s’être mis en contradiction avec les principes qu’il professait en l’an III ; il répondit par ces sages paroles, que l’on ne saurait trop rappeler aux partis qui, depuis quarante ans, se sont chez nous disputé le pouvoir, en sacrifiant le pays à leur ambition :

« La liberté, l’ordre, le bonheur des peuples, sont le but des associations humaines ; les organisations politiques ne sont que des moyens, et un républicain éclairé est beaucoup plus disposé à devenir un royaliste constitutionnel qu’un partisan de la monarchie absolue. Entre la monarchie constitutionnelle et la république, la différence est dans la forme. Entre la monarchie constitutionnelle et la monarchie absolue, la différence est dans le fond. »

Le nouveau gouvernement ne tarda point à montrer que tout en promettant la monarchie constitutionnelle, il était disposé à rentrer dans les voies de la monarchie absolue. Un projet de loi fut présenté au Corps législatif dans le but de soumettre à la censure tous les écrits qui n’auraient point trente feuilles d’impression, et de défendre aux journaux et aux publications périodiques de paraître sans une autorisation du roi. L’article 8 de la Charte était ouvertement violé. Benjamin Constant répondit au projet de loi par un opuscule intitulé : De la liberté des brochures, des pamphlets et des journaux considérée sous le rapport de l’intérêt du gouvernement. Deux éditions en un seul jour témoignèrent de l’effet produit sur l’opinion publique par ce brillant plaidoyer qui semble résumer à l’avance tout ce qui a été dit depuis soixante ans sur la question.

Un nouvel écrit, la Responsabilité des ministres, obtint un égal succès, et déjà les illusions que les libéraux s’étaient faites au sujet de la restauration commençaient à s’évanouir, lorsqu’on apprit à Paris le retour de Napoléon. Benjamin Constant ne s’en montra pas moins, dans le premier moment, disposé à soutenir la cause des Bourbons, parce qu’il la croyait plus favorable aux intérêts du pays.

« L’homme qui nous menace, disait-il, avait tout envahi, il enlevait les bras à l’agriculture, il faisait croître l’herbe dans nos cités