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III


LA PUISSANCE DE LA LOI ET SES LIMITES.

Les individus ont des droits, et ces droits sont indépendants de l’autorité sociale, qui ne peut leur porter atteinte sans se rendre coupable d’usurpation.

Il en est de l’autorité comme de l’impôt : chaque individu consent à sacrifier une partie de sa fortune pour subvenir aux dépenses publiques, dont le but est de lui assurer la jouissance paisible de ce qu’il conserve ; mais si l’État exigeait de chacun la totalité de sa fortune, la garantie qu’il offrirait serait illusoire, puisque cette garantie n’aurait plus d’application. De même chaque individu consent à sacrifier une partie de sa liberté pour assurer le reste ; mais si l’autorité envahissait toute sa liberté, le sacrifice serait sans but.

Cependant, quand elle envahit, que faut-il faire ? Nous arrivons à la question de l’obéissance à la loi, l’une des plus difficiles qui puisse attirer l’attention des hommes. Quelque décision que l’on hasarde sur cette matière, on s’expose à des difficultés insolubles. Dira-t-on qu’on ne doit obéir aux lois qu’autant qu’elles sont justes ? On autorisera les résistances les plus insensées