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l’esclavage, elle consacrait notre droit à une indemnité pour la perte que nous devions en éprouver.

Depuis lors la France a fait l’essai d’une loi nouvelle ; cette loi, créée en vue de l’abolition dans laquelle on voulait nous faire entrer, se ressent de l’inconvénient qui s’attache à toutes les mesures mixtes, ordinairement impuissantes à faire le bien. À côté de l’esclavage, qu’elle laisse debout, elle renverse les principes qui en faisaient la base et l’appui ; elle ébranle notre état social, compromet notre avenir et porte atteinte à nos propriétés.

Cependant, quelque difficile et dangereux que soit pour les maîtres les mesures sous lequel elle les place, résignés et confiants dans le régime que le gouvernement aurait senti la nécessité de prendre pour conserver l’ordre et le travail, nous nous serions soumis à l’exécution de cette loi ; mais elle ne répond plus aujourd’hui à l’impatience des abolitionistes, qui, sans doute dans la crainte de ne pouvoir s’appuyer sur les colons pour l’exécution d’une mesure radicale et complète, songent à des mesures partielles qui ne nous laisseraient entrevoir que ruine de tous côtés.

Dans une circonstance aussi grave, il n’est plus permis aux représentants des colonies de rester impassibles et muets ; éveillés par la crainte d’un danger imminent, ils doivent porter jusqu’au pied du trône l’expression de leurs vœux…

L’esclavage dans les colonies forme un tout homogène, dans lequel il n’est pas possible d’infiltrer la liberté sans en affaiblir les ressorts. Nous concevions l’affranchissement partiel, nous le favorisions ; le temps qui a suivi la faculté que nous avons de lui donner un libre cours, dégagé des entraves que le gouvernement y avait lui-même apportées, a prouvé que nous savions récompenser du prix de la liberté ceux qui s’en étaient montrés dignes, et les statistiques de cette époque donnent la mesure de notre prodigalité à cet égard ; mais l’affranchissement faisait tout aussitôt entrer celui qui en avait reçu le bienfait dans une classe à part, complètement séparée de l’esclavage. Nous savons par expérience tout le mal qu’il y avait à mettre en contact ceux deux éléments de la société coloniale.

Des mesures partielles qui, par exemple, placeraient à côté