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les amusait par ses reparties bouffonnes et par son insouciance. D’autres fois, il flânait dans l’entrepont, et y baragouinait le français, l’anglais et l’allemand avec tout le monde : on n’en comprenait qu’un mot par-ci par-là, et il faisait rire chacun par ses balourdises. Les Français le nommaient Jocrisse et les Allemands Hauswurst ; il répondait à ces noms, dont la signification lui était inconnue, avec autant de sérieux que si le curé l’eût baptisé ainsi à sa naissance.

Le Jonas devait encore subir une rude épreuve : les passagers devaient voir encore une fois la mort s’élever entre eux et la terre promise de l’or ; – et, cette fois, le danger devait être si menaçant, que tous ceux qui étaient à bord du Jonas allaient implorer la miséricorde céleste à deux genoux et les mains levées au ciel. Au cap Horn, ce point extrême de la quatrième partie du monde, ils furent assaillis par de longues et terribles tempêtes ; une nuit, ils se virent entourés dans l’obscurité par de formidables montagnes de glace, et les marins eux-mêmes, renonçant à tout espoir de délivrance,