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homme bien élevé, qui haïssait également les façons grossières et les plaisanteries triviales ; le jeune gentilhomme s’était calmé et paraissait avoir du chagrin ; les autres, à la vérité, restaient spirituels à leur façon ; mais on n’était pas obligé de les écouter plus longtemps qu’on ne voulait. Le plus singulier de leurs compagnons était celui qui se disait docteur en médecine. Celui-là absorbait du matin au soir d’énormes quantités de liqueurs fortes. Les quelques bouteilles de cognac dont se composait sa provision personnelle furent bientôt vidées, mais il avait découvert un moyen de se procurer tous les jours une grande quantité d’eau-de-vie. Il se promenait sur le pont et dans la salle commune, et employait toutes sortes de stratagèmes pour faire croire à l’un ou à l’autre des passagers qu’il était malade ou qu’une maladie le menaçait. À ceux qui le croyaient, il disait :

— Ne craignez rien, je vous guérirai ; mais gardez-vous de boire une seule goutte de genièvre, sinon je vous abandonne et vous laisse mourir sans secours. Vous recevrez cependant votre ration