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minutes après, tous les passagers se trouvaient réunis autour des gamelles.

C’étaient de singuliers convives que le sort avait donnés à Victor et à son ami Jean : un procureur de la république française, qui s’était enfui de son pays pour des raisons inconnues ; un docteur en médecine ; un banquier allemand, qui avait tout perdu à la roulette à Hombourg ; un jeune gentilhomme de la Flandre occidentale, qui avait dépensé les derniers débris de la fortune paternelle, avant son départ pour la Californie ; un officier français qui se vantait d’avoir tué son supérieur dans un duel.

À la première vue, Victor crut qu’il n’avait pas à se plaindre du sort ; et, en effet, comme nos amis avaient pris une place de seconde classe, ils n’étaient pas mêlés avec les pauvres gens de la troisième classe, qui dormaient et vivaient tous ensemble dans l’entre-pont comme dans une étable.

Mais que son cœur sensible fut blessé de la conversation grossière et ignoble de ses compagnons ! Pendant tout le dîner, il n’entendit que jurons et blasphèmes, jeux de mots stupides et sorties bru-