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émotion ; cependant il ne put résister davantage à la pressante supplication de Mathilde, il lui prit la main et dit :

— Eh bien, ma fille, accompagne-moi et viens rendre visite à l’infortuné Adolphe. Mais, je t’en prie, cesse de m’affliger par ton désespoir ; songe que Dieu nous a accordé aujourd’hui des faveurs signalées, et que ce désespoir pourrait éveiller son courroux.

Au moment où il achevait ces paroles, ils se trouvaient déjà hors de la cellule et dans le corridor.

On avait transporté Adolphe dans le grand réfectoire du couvent ; un lit de plumes avait été étendu sur le parquet, et le blessé y avait été déposé avec précaution. Un prêtre très-habile dans l’art de guérir avait exploré son corps avec soin et n’y avait trouvé aucune blessure apparente. De longues lignes bleuâtres marquaient la place des coups qu’il avait reçus, et le sang figé sous la peau en maints endroit attestait de graves contusions. Immédiatement après qu’il eut été saigné, on rafraîchit son corps par de bienfaisantes ablutions et on l’oignit d’un baume fortifiant. Ces soins le réconfortèrent un peu ; mais, bien que ses yeux ne fussent plus aussi ternes et aussi vitreux, il n’en semblait pas moins sur le point d’expirer. Autour du lit de mort un grand nombre de chevaliers gémissaient sur la triste situation de leur ami. Messire Jean de Renesse, Arnould d’Audenaerde et Pierre de Coninck secondaient le prêtre