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Marie, debout devant Robert écoutait avec ravissement les éloges donnés à son frère.

Pendant que Mathilde contemplait son père avec une sorte d’extase, on entendit soudain un bruit de voix confuses à la porte extérieure de l’abbaye. Cela ne dura que peu d’instants et tout redevint silencieux comme auparavant. Bientôt la porte de la cellule s’ouvrit, et Guy, frère de Robert, entra d’un pas lent et l’abattement peint sur les traits ; il s’approcha du comte et dit :

— Un grand malheur, mon frère, nous frappe aujourd’hui dans un homme qui nous est cher à tous : les Gantois l’ont trouvé au milieu des morts sur le champ de bataille, et viennent de le transporter ici. Son âme flotte sur ses lèvres, et peut-être sa dernière heure est-elle proche ; il demande à vous voir encore avant de quitter ce monde. Je vous en prie, mon frère, accordez-lui cette dernière faveur. Il se tourna vers la sœur d’Adolphe et ajouta :

— Il vous demande aussi, noble demoiselle.

Un cri de douleur s’échappa du sein des deux jeunes filles. Mathilde tomba dans les bras de son père, sans sentiment et comme frappée de mort ; Marie, sans vouloir entendre un mot de plus, s’élança vers la porte en poussant une exclamation déchirante et quitta la chambre. Deux religieuses accoururent à ces cris de détresse et reçurent Mathilde inanimée des bras du chevalier. Celui-ci donna encore un baiser à sa fille et se disposa à aller voir