Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/561

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

il fit transporter le blessé au camp, avec toutes les précautions possibles.

Mathilde s’était retirée, avant la bataille avec la sœur d’Adolphe, dans une cellule de l’abbaye de Groningue. Il n’y avait assurément personne en ce moment dans toute la Flandre qui fût en proie à une plus douloureuse et plus poignante anxiété ; tous ses proches et son bien-aimé Adolphe étaient engagés dans la lutte. De cette lutte, entamée par les Flamands contre des forces bien supérieures aux leurs, dépendait la liberté de son père ; cette bataille devait relever le trône de Flandre ou le briser pour jamais. Si les Français remportaient la victoire, elle prévoyait la mort de tous ceux qui lui étaient chers, et pour elle le sort le plus affreux !

Dès que la trompette fit retentir le champ de bataille de sous belliqueux, les deux jeunes filles frissonnèrent et pâlirent, comme si un coup mortel les eût frappées en même temps. En ce moment terrible et solennel, il était difficile qu’elles exprimassent les foudroyantes émotions qui torturaient leur âme ; chaque parole échangée ajoutait à leurs appréhensions ; aussi étaient-elles tombées, d’un même mouvement, à genoux sur le prie-Dieu. Leurs têtes s’affaissèrent pesamment sur le pupitre, et des larmes silencieuses baignèrent leurs joues. Elles étaient là, priant avec une indicible ferveur, et immobiles