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— Connétable, c’est là un conseil de Lombard ! Auriez-vous peur de ce tas de loups, ou auriez-vous, par hasard, de leur poil !

Il voulait dire par là que le connétable aimait les Flamands et voulait peut-être les favoriser dans la lutte, au détriment de la France. Raoul, blessé de ce reproche, fut saisi d’une grande colère : il se rapprocha davantage du comte d’Artois et lui dit d’un ton amer :

— Vous doutez de mon courage ? Vous m’insultez ? Eh bien, je vous demande, moi, si vous osez me suivre, sur-le-champ et seul, jusque dans les rangs de l’ennemi ? Je vous promets de vous mener si loin que jamais vous n’en reviendrez…

Quelques autres chevaliers s’interposèrent entre les deux chefs et firent si bien qu’ils parvinrent à les calmer ; eux aussi remontrèrent au sénéchal que le passage du ruisseau était impossible ; mais le comte d’Artois n’en voulut point entendre parler et donna ordre à Raoul de Nesle de marcher de nouveau en avant[1].

Le connétable, emporté par son dépit, se lança au galop avec sa troupe sur l’armée flamande ; mais, aux abords du ruisseau, tous les cavaliers des pre-

  1. Un grand nombre d’autres officiers, qui, eux aussi, avaient remarqué la difficulté que présentait le passage du ruisseau, firent leurs observations au comte d’Artois ; mais ce prince ne voulut pas en tenir compte. (Voisin.)