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parlaient afin qu’ils reconnussent mieux la voix de leur maître dans le tumulte de la bataille. Qui aura l’honneur de porter le premier coup ? telle était la pensée qui les préoccupait tous. Cet honneur était hautement prisé au temps des chevaliers ; quand ils le remportaient dans une bataille importante, ils s’en faisaient gloire durant toute leur vie et l’estimaient la preuve d’une incontestable bravoure ; c’est pourquoi tous tenaient leurs chevaux prêts et la lance en arrêt pour s’élancer en avant au premier ordre, au moindre signe du général.

Dans les prairies qui s’étendaient devant l’armée, l’infanterie française s’avançait, se massait, se déployait lentement, en décrivant des ondulations sur le terrain, comme un formidable serpent, le tout avec le plus grand silence.

Lorsque Guy s’aperçut que l’attaque allait commencer, il envoya mille frondeurs sous le commandement du sire de Sevecote, jusqu’au bord du second ruisseau, pour inquiéter l’avant-garde française ; puis il fit prendre aux divers corps de l’armée une position qui les forma en carré et leur permit d’apercevoir le centre du camp. Un autel de gazon y était érigé ; le grand étendard de saint Georges, patron des guerriers, déroulait l’image du vainqueur du dragon au-dessus du prêtre qui, en grand costume sacerdotal, priait sur les marches de l’autel pour l’heureuse issue de la bataille. Quand il eut terminé son invocation, il monta jusqu’à la dernière marche