Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/49

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que le vieux comte de Flandre s’était assis, au retour de la chasse : il reposait dans un fauteuil lourd et massif, en proie à une profonde préoccupation ; et, la tête appuyée sur sa main droite, il contemplait d’un regard vague et inattentif son fils Guillaume, assis non loin de lui et occupé à lire des prières dans un livre à fermoir d’argent. La comtesse Mathilde, fille de Robert de Béthune, jouait avec son oiseau favori à l’autre extrémité de la salle. Elle caressait l’oiseau sans prendre garde à son grand’père ni à son oncle Guillaume. Tandis que Guy, dominé par un sombre pressentiment, songeait à ses malheurs passés et que Guillaume implorait la miséricorde du ciel, l’insouciante jeune fille ne se préoccupait nullement de ce que le patrimoine de son père fût tombé aux mains des Français. Cependant, le cœur de la jeune fille, encore à demi enfant, n’était pas insensible ; mais sa tristesse, léger nuage, ne durait pas plus longtemps que l’événement qui le faisait naître. Quand on lui annonça que toutes les villes de Flandre étaient conquises par l’ennemi, elle fondit en larmes et pleura amèrement ; mais, dès le soir du même jour, le faucon était choyé de nouveau, et les larmes de la jeune fille étaient séchées et oubliées.

Depuis longtemps, le vieillard considérait son fils d’un œil incertain et attendri, lorsque tout à coup il abaissa la main qui soutenait sa tête, et lui dit :