Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/483

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Il a raison ! s’écria Hugues d’Arckel avec colère ; nous ne combattons pas des Maures, messires, et c’est une œuvre déshonorante qu’on nous propose. Songez que nous avons affaire à des chrétiens. Il coule encore du sang thiois[1] dans mes veines, et je ne souffrirai pas qu’on traite mes frères comme des chiens ; ils nous offrent la bataille en rase campagne, et nous devons les combattre, selon les lois de la guerre.

— Est-il possible, reprit le comte d’Artois, que vous preniez le parti de ces misérables manants ? Déjà notre roi, par excès de bonté, a essayé tous les moyens de les amener à composition, mais rien n’a réussi ; et maintenant il nous faudrait laisser égorger nos hommes, insulter et calomnier notre roi, et ménager de plus la vie de ces sujets rebelles ! Non, cela ne sera pas : je sais quels ordres m’ont été donnés, et je les exécuterai et les ferai exécuter.

— Monseigneur d’Artois, dit Rodolphe de Nesle avec un redoublement d’énergie, je ne sais quels sont les ordres que vous avez reçus, mais je vous déclare que je n’y obéirai point s’ils sont en opposition avec l’honneur de la chevalerie ; le roi lui-même n’a pas le droit de déshonorer mes armes.

  1. On désignait autrefois les peuples qui parlent la langue flamande par la dénomination générale de thiois (Dietsche), dénomination remplacée aujourd’hui par celle de bas-allemands (nederduitsch).