Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/383

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bouchers, et tous avaient levé leurs armes contre le traître dont ils voulaient la mort. Comme le cœur du léliard se serra quand il vit briller ces milliers de haches comme une sentence de mort ! Il se tourna vers les autres chevaliers, et dit d’une voix abattue :

— Il nous faut mourir, messires : il n’y a pas de grâce pour nous ; car ils aspirent après notre sang, comme des chiens altérés. Ils ne partiront pas ! Ô mon Dieu ! qu’allons-nous faire ?

— Il n’est pas honorable de périr de la main de cette canaille, répondit le sire de Châtillon ; je voudrais être mort l’épée au poing, en digne chevalier ; mais puisqu’il en est ainsi, soit !

La froide résignation de messire de Châtillon attrista plus encore de Gistel.

— Soit ! répéta-t-il ; ô mon Dieu, quel horrible moment ! Comme ils vont nous martyriser ! Mais, messire de Mortenay, je vous en prie, pour l’amour de Dieu, vous qui avez beaucoup d’influence sur eux, demandez-leur s’ils consentent à nous laisser la vie, au prix d’une forte rançon. Je ne veux pas mourir de leur main, et je donnerai tout ce qu’ils demanderont, quelque forte que soit la somme.

— Je vais le leur demander, répondit de Mortenay, mais ne vous laissez pas voir, car ils vous arracheraient de la maison.

Il ouvrit la fenêtre et cria :

— Maître Breydel, messire de Gistel vous fait demander si vous voulez lui accorder un sauf-conduit,