Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/362

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le sang qui souillait ses doigts faisait surtout frémir les spectateurs ; un horrible soupçon leur faisait deviner son origine. Ce sang venait sans doute de la blessure de sa mère, peut-être sortait-il de ce cœur qui l’avait tant aimé, et Breydel avait-il puisé dans cet affreux attouchement la fureur qui devait lui donner plus de force et plus d’ardeur pour se venger. Il erra silencieux à travers la forêt jusqu’à ce que le soir enveloppât le camp d’un voile d’ombres et cachât le doyen aux yeux de ses compagnons.

À son arrivée à Ardenburg, de Coninck plaça ses deux mille tisserands sous les ordres d’un des principaux chefs, et envoya un messager muni d’instructions au commandant Lindens. Quand il eut pris toutes les mesures nécessaires pour concentrer les trois divisions de l’armée à Sainte-Croix, il remonta à cheval et se rendit directement à Bruges. Il laissa sa monture dans une auberge voisine de la porte et entra à pied dans la ville, sans obstacle, car la soirée était déjà avancée ; les portes étaient ouvertes et l’on n’apercevait pas d’autre soudard que la sentinelle qui veillait sur le rempart. Un morne silence, un calme effrayant régnaient dans les rues qu’il lui fallut traverser. Bientôt il s’arrêta devant une humble maison située derrière l’église Saint-Donat, et il se disposait à frapper lorsqu’il s’aperçut que la maison n’avait pas de porte et que l’entrée en était fermée par un long morceau de