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détachement de cavalerie, qui s’avança menaçant vers la foule, eut bientôt fait taire ces marques de compassion. En peu d’instants, une large potence fut dressée sur le marché, et un prêtre fut amené aux condamnés. À la vue du terrible instrument de supplice, les femmes et les frères des infortunés klauwaerts se mirent à demander grâce en pleurant, et le peuple se porta tumultueusement en avant. Un énergique murmure, où les imprécations se confondaient avec les cris de vengeance, monta vers le ciel et parcourut tout le marché, comme un signe précurseur de l’émeute. Bientôt un sonneur de trompette s’avança vers la foule, et cria :

— Écoutez bien, afin que nul n’en ignore ! Le rebelle qui, par des cris ou de tout autre manière, oserait troubler le cours de la justice de messire le gouverneur du pays de Flandre, sera pendu haut et court à la même potence que ces mutins !

Cette proclamation fit mourir plaintes et protestations sur toutes les lèvres, et un silence de mort plana sur le peuple en proie à une horrible anxiété. Les femmes pleuraient en levant les yeux au ciel, et imploraient Celui qui, seul comprend et écoute encore les hommes quand un tyran leur défend de parler ; les hommes maudissaient leur impuissance, et brûlaient d’une rage fébrile. Sept klauwaerts furent successivement attachés au gibet, et moururent sous les yeux de leurs concitoyens. La tristesse de ceux-ci se changea en désespoir : chaque fois qu’une des