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pendant pas, même après les avoir entendues, que vous les ayez prononcées dans l’intention de m’outrager ou de me blesser.

— Oh ! non, sur mon honneur, reprit Robert ; votre générosité a fait de moi votre ami ; mais je ne peux croire que vous disiez avec conviction que Philippe de France soit un féal chevalier ?

— Écoutez, reprit le comte de Valois ; je vous le répète, Philippe de France, mon frère, a l’âme la plus noble et le cœur le plus droit ; mais de lâches flatteurs l’entourent et se font ses conseillers. Enguerrand de Marigny[1], ce démon incarné le pousse sans cesse au mal, et une autre personne lui conseille les fautes qu’il commet. Le respect me ferme la bouche et m’empêche de la nommer ; elle seule est la cause de vos malheurs…

— Et quelle est cette personne, s’écria le comte de Châtillon avec hauteur ?

— Vous demandez ce que vous savez, messire, répondit Robert de Béthune ; mais faites bien attention à mes paroles, je vais vous la nommer cette femme, cette reine, c’est Jeanne de Navarre votre nièce[2] qui retient en captivité ma sœur infor-

  1. Enguerrand de Marigny, seigneur de Normandie, capitaine du Louvre et chargé de l’administration des finances sous Philippe le Bel. Il n’usa de son pouvoir que pour faire le mal, gaspilla les revenus du royaume, falsifia les monnaies et appauvrit le peuple en l’accablant d’impôts injustes et arbitraires.
  2. Jeanne, fille unique de Henri Ier, roi de Navarre, hérita