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Afin de ne pas manquer sa vengeance, de Gistel promena les yeux sur le peuple étonné et choisit huit hommes qui se trouvaient dans la foule ; il les nomma à messire de Châtillon. Puis un héraut d’armes s’avança vers le peuple, et, après avoir commandé le silence par un appel de trompette, il cria :

— Au nom du puissant roi Philippe, notre seigneur et maître, sont appelés et assignés sur-le-champ par devant messire de Châtillon, ceux dont je vais proclamer les noms ; ceux qui ne se présenteraient pas seront punis de mort sans grâce ni délai !

La ruse réussit complétement ; car, à mesure que leurs noms furent prononcés, les klauwaerts appelés sortirent de la foule, et se rendirent sans défiance devant messire de Châtillon ; ils savaient qu’ils n’avaient rien de bon à attendre, et eussent peut-être cherché leur salut dans la fuite, si cela eût été possible. La plupart étaient des hommes d’une trentaine d’années : un seul vieillard s’avança à pas lents et la tête courbée. Une calme résignation était peinte sur ses traits, où l’on n’eût pu remarquer la moindre expression de crainte. Il s’arrêta devant messire de Châtillon et fixa sur lui un œil interrogateur comme pour lui dire :

— Que voulez-vous de moi ?

Dès que le dernier appelé se fut approché, le gouverneur fit un signe, et huit klauwaerts furent garrottés, malgré leur résistance. Un sourd et plaintif murmure s’éleva dans les rangs du peuple, mais un