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Ils embrassèrent Mathilde l’un après l’autre, et ces doux épanchements lui firent oublier tous ses malheurs. Lorsque Guillaume de Juliers approcha à son tour, elle le regarda avec étonnement de la tête aux pieds, et demanda :

— Qu’est-ce, monseigneur Guillaume ? pourquoi portez-vous cette cuirasse par-dessus votre soutane, et pourquoi cette longue épée accompagne-t-elle un ministre du Seigneur ?

— Le prêtre qui défend la patrie, combat aussi pour les autels de son Dieu ! répondit Guillaume.

De Coninck et Breydel se tenaient la tête découverte, à une petite distance du lit de camp, et partageaient l’ivresse générale. Mathilde les regarda avec une profonde reconnaissance ; elle attira encore la tête de son père contre sa poitrine, et demanda à voix basse :

— Voulez-vous me promettre quelque chose, mon père chéri ?

— Tout, mon enfant : tes souhaits me réjouiront.

— Je vous prie, mon père, de récompenser ces deux sujets selon leur mérite : ils ont risqué chaque jour leur vie pour la patrie.

— Que ton désir s’accomplisse, Mathilde ! je ferai en sorte qu’ils puissent aussi t’embrasser une autre fois, quand ils l’auront mérité comme maintenant ; détache tes bras de mon cou, car je dois causer avec Guy.