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des deux mains et la fit tournoyer si rapidement, qu’aucun des Français n’osait approcher, car chaque coup de son arme terrible tombait comme un pesant coup de marteau sur l’armure de ses ennemis. Le cavalier qui portait la jeune fille se défendait avec une longue épée, et tenait son fardeau tremblant serré contre sa poitrine. La jeune fille, succombant aux émotions de ces alternatives de craintes et d’espoir, n’avait plus la force de parler ni de se plaindre ; ses yeux étaient d’une fixité effrayante, et ses joues d’une pâleur mortelle. Parfois elle levait vers son libérateur inconnu des mains suppliantes ; mais bientôt elle tomba évanouie sur le cou de son coursier. Les chocs terribles des épées sur les casques et les boucliers retentissaient au loin dans les bois voisins, et le sang coulait en filets rouges sous les cuirasses ; mais les combattants, dans leur ardeur de la vengeance, paraissaient ne pas sentir leurs blessures et continuaient la lutte en haletant. Les armures étaient brisées et pour ainsi dire hachées en maint endroit, et le cheval du commandant de Saint-Pol portait au cou une large blessure ; son maître avait grand’peine à le conduire de manière à éviter les coups du chevalier noir. Saint-Pol, voyant que le combat prenait une tournure très-désavantageuse aux Français, fit un signe au soldat qui tenait la dame. Le soldat comprit et tenta de s’enfuir du champ de bataille ; mais le chevalier noir devina son intention et, enfonçant l’éperon dans le flanc de son