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tombe ou celle des étrangers. Que notre mort ou notre victoire soit un éternel opprobre pour les lâches tisserands ! Que celui qui n’a pas le cœur d’un franc boucher, s’en retourne chez lui… Voyons, qui combat avec moi, jusqu’à la mort ?

Les voix de tous les bouchers retentirent en une lugubre acclamation, et trois fois ils poussèrent le cri : jusqu’à la mort ! comme une lamentation montant du sein de l’abîme ! Jusqu’à la mort : telle fut l’exclamation qui s’échappa de sept cents poitrines ardentes et se perdit au milieu du grincement des haches mordues par l’aiguisoir d’acier.

Pendant que ce serment était proféré par Breydel et ses bouchers, la plupart des doyens, convaincus par de Coninck, avaient accepté le triste moyen de salut qu’on leur offrait et consenti à la reddition de la ville ; mais cet acte devenait impossible en présence de l’opposition de Breydel. Toutefois, à la vue des formidables machines de guerre qui continuaient à s’élever presque sous les yeux, ils résolurent d’entrer en négociation avec l’ennemi, malgré le doyen des bouchers.

Mais l’impatient Breydel devina leur projet, Comme un lion blessé, il poussa un rugissement furieux où se confondaient des paroles inintelligibles et se précipita vers de Coninck. Les bouchers, qui avaient compris la colère de leur chef, le suivirent en désordre et pleins du désir de la vengeance.