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sa délivrance. C’est un devoir pour tous les métiers, c’est une fête pour les bouchers ! À l’œuvre ! à l’œuvre ! Retroussez vos manches !

Une clameur formidable répondit à ces ardentes paroles, et tandis que la corporation des bouchers obéissait à ses ordres, Breydel mit lui-même ses bras musculeux à nu jusqu’à l’épaule et s’écria, en s’élançant à bas du chariot :

— En avant, et sauvons le doyen des tisserands !

— Sauvons de Coninck ! cria-t-on de toutes parts. En avant ! en avant !

La foule se précipita comme une mer en furie vers le Princenhof. Des cris de mort et le cliquetis des armes accompagnaient le redoutable cortége, qui s’avançait en grossissant toujours ; les imprécations des hommes et les aboiements des chiens se mêlaient au son des cloches et aux roulements des tambours : on eût dit qu’une rage universelle s’était emparée des bons bourgeois de Bruges.

À la vue de cette multitude exaspérée, les gardes du Princenhof s’enfuirent dans toutes les directions, et laissèrent le palais sans défense ; mais tous ne purent s’échapper à temps, car en peu d’instants plus de dix cadavres jonchèrent les marches du perron.

Breydel furieux franchit l’escalier en courant ; il rencontra, à l’entrée du vestibule, un léliard qui s’enfuyait ; il le saisit et le lança par-dessus sa tête. L’infortunée victime fut reçue sur la pointe des goedendags, puis achevée à coups de masses d’armes.