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de fer étreignit sa taille, et une lourde chaîne attacha son pied gauche à sa main droite. On mit près de lui du pain et une crache d’eau ; la porte fut refermée, et il resta seul dans les ténèbres. Les paroles du collecteur des impôts l’avaient jeté dans la plus grande tristesse ; il sentait que la liberté de sa ville natale était sérieusement menacée. Que n’oserait-on pas pendant son absence ? Les léliards pouvaient introduire des soldats dans la ville, et détruire l’édifice auquel il avait voué toute sa vie. Douleur affreuse pour ce noble et généreux ami du peuple ! Lorsque, dans son désespoir, il tordait ses fers et les entendait résonner lugubrement, il lui semblait voir ses frères, chargés de chaînes comme lui et livrés à la plus honteuse servitude. Alors, une larme amère coulait sur ses joues.

Les léliards avaient depuis longtemps projeté entre eux un odieux complot : tous les citoyens de Bruges étaient armés ; il leur était impossible de les contraindre à exécuter les ordres qu’ils donnaient, et leur domination courait le risque de n’être que passagère. Dès que les magistrats voulaient employer la force contre la bourgeoisie, les terribles goedendags apparaissaient, et tous les efforts demeuraient inutiles en face des métiers, trop puissants dans cette situation ; et, afin de se débarrasser de ce formidable obstacle, les léliards convinrent avec le comte de Châtillon que, le lendemain, de très-bonne heure, les bourgeois seraient surpris à l’im-