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— En voilà assez sur ce sujet, messires ! dit Châtillon, et finissons cette conversation. À propos, ajouta-t-il, savez-vous ce que notre gracieux roi Philippe prétend faire de ce noble pays de Flandre ?… Sur ma parole, si notre illustre souverain tient son coffre-fort fermé, comme monseigneur de Valois garde sa bouche close, on fera maigre chère à la cour.

— Propos en l’air ! répondit Pierre Flotte ; le roi parle quand cela lui plaît. Ralentissez un peu l’allure de vos chevaux, messires, et je vous apprendrai des choses que vous ignorez.

Les chevaliers se rapprochèrent avidement les uns des autres, et laissèrent le comte de Valois prendre quelque avance. Quand il fut assez loin, pour ne pouvoir les entendre, le chancelier reprit :

— Écoutez, les coffres de notre gracieux roi Philippe le Bel, sont vides. Enguerrand de Marigny lui a fait accroire que la Flandre pouvait les remplir, et, certes, ce n’est pas là un mensonge ; car ce petit pays, où nous sommes, possède plus d’argent à lui seul que toute la France entière.

Les chevaliers sourirent et secouèrent la tête à plusieurs reprises, en signe d’assentiment.

— Écoutez encore, continua Pierre Flotte, nous avons une reine qui s’appelle Jeanne et qui déteste les Flamands. Sa haine, contre ce peuple hautain, ne saurait s’exprimer. Elle disait, il y a quelque temps — je l’ai entendu de sa propre bouche — qu’elle vou-