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unies devaient tenir une couronne de lauriers au-dessus de la tête de Philippe le Bel et de Jeanne de Navarre. De splendides tentures entouraient le trône et de riches tapis recouvraient jusqu’à une certaine distance le pavé de la place.

À l’entrée de la rue des Pierres, quatre piédestaux étaient peints en marbre blanc, et sur chacun se tenait un sonneur de trompette costumé en renommée, avec de longues ailes, et vêtu de pourpre.

À côté de la grande boucherie, à l’entrée de la rue des Femmes, on admirait un magnifique arc de triomphe soutenu par des piliers gothiques. Tout au sommet, à la clef de la voûte, était suspendu l’écu de France, qui se détachait sur un fond de pourpre ; plus bas, adossés contre les deux piliers, des écussons aux armes de Flandre et de Bruges ; dans tous les cartouches on avait peint des emblèmes destinés à flatter le souverain étranger. Ici c’était le noir Lion de Flandre rampant devant une fleur de lis, là les fleurs de lis remplaçaient les étoiles du ciel : partout enfin les peintures et les emblèmes étaient inspirés par les plus basses flatteries.

Si Jean Breydel n’en eût pas été empêché par le doyen des tisserands, ces emblèmes humiliants, n’eussent pas longtemps irrité le sentiment populaire ; mais il dévorait son ressentiment et contemplait tout avec une sombre résignation. De Coninck lui avait fait comprendre, à grand’peine, que le moment n’était pas encore venu.