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— Tant mieux, maître Jean, tant mieux ! laissez-les faire !

— Tant mieux ! Que voulez-vous dire ? Voyons, maître, auriez-vous mis votre pourpoint à l’envers, et emploieriez-vous à nous trahir votre esprit fin comme celui du renard ? Je ne sais, mais il me semble que vous commencez à sentir fameusement le lis !

— Non, non, ami Jean, mais songez donc que plus les esprits s’aigrissent plus la délivrance est proche. Car si nos ennemis, plus prudents, gouvernaient le pays avec une apparence de justice, le peuple s’endormirait sous le joug, et l’édifice de notre liberté s’écroulerait pour jamais. Sachez, maître doyen, que la tyrannie du souverain couve, comme une mère, la liberté du peuple. Ah !… s’ils avaient touché aux priviléges de notre ville, je serais le premier à vous conseiller la résistance, et encore ce serait sans recourir à la force ouverte, et l’on peut employer des armes dont les coups sont plus sûrs.

— Je vous comprends, maître, dit Breydel. Vous avez toujours raison, tout comme si vos paroles étaient couchées sur parchemin. Comme ils me pèsent pourtant terriblement sur les épaules, ces hautains étrangers ! Mieux valent encore les Sarrazins ! Mais, comme vous le dites très-bien, plus une grenouille se gonfle, plus vite elle crève ! Je le reconnais malgré moi, et la raison est encore du côté des tisserands.

— Oui, oui, maître Breydel, la raison est notre lot,