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— Pendre un Flamand ? murmura-t-il ; cela ne sera pas facile, mes maîtres…

Il se rejeta de quelques pas en arrière, s’adossa contre un arbre, retroussa jusqu’à l’épaule la manche de son pourpoint, et tira du fourreau la lame étincelante de son poignard. Alors il se tint immobile : les muscles de ses bras nus se roidirent et sa physionomie prit quelque chose de la face du lion.

— Malheur à qui me touche ! s’écria-t-il d’une voix tonnante. Les corbeaux de Flandre ne dévorent point un Flamand ; ils aiment mieux la chair de l’étranger !

— Sus au Flamand ! s’écria Châtillon. Sus au manant !… tombez-lui… Mais voyez-donc les lâches !… Son couteau vous fait-il peur ? Je ne puis souiller mes mains de son sang… C’est votre besogne à vous autres, vilains contre vilains… Ne m’entendez-vous pas ?… Obéissez ! allons…

Quelques chevaliers s’efforçaient de calmer le comte. Mais la plupart eussent volontiers applaudi au Flamand pendu ; et les hommes d’armes, stimulés par leur maître, eussent assailli le jeune homme si en ce moment, n’était survenu le chevalier qui, jusques-là, s’était tenu à l’écart, plongé dans ses réflexions. Son costume et son armure dépassaient de beaucoup en richesse ceux de ses compagnons ; l’écusson, brodé sur sa poitrine, portait trois fleurs de lis d’or, sur un champ d’azur, surmontées d’une couronne de comte était l’indice d’un sang royal