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soit découvert un jour ; et il y a lieu de croire que, dans ce cas, la pauvre jeune fille serait livrée à Jeanne de Navarre…

— Jamais tant que je vivrai ! s’écria Adolphe en se redressant sur son lit ; mais vous avez raison, maître Rogaert, il faut éviter ce malheur, et que faire pour cela ? Ô mon Dieu ! Et me sentir ici, retenu dans une misérable impuissance, au moment où elle a besoin de moi…

— Je connais une retraite, reprit Rogaert, où Mathilde serait en sûreté.

— Et quelle est cette retraite ?

— Ne croyez-vous pas, messire Adolphe, qu’elle se trouverait à l’abri de tout danger dans le pays de Juliers[1], chez son cousin Guillaume ?

Le chevalier s’effraya visiblement à cette question. Laisserait-il partir Mathilde pour un pays étranger ? Permettrait-il à un autre le soin de prendre sa défense ? Il ne pouvait s’y résoudre, puisqu’il s’était déjà imposé la mission de rendre Mathilde à son père et de la préserver de toute insulte.

Il réfléchit, longtemps, s’efforçant de résoudre cette difficulté, et, lorsqu’il crut l’avoir trouvé, une expression de joie illumina son visage et il répondit en souriant :

  1. Le pays de Juliers comprenait les villes de Juliers, de Duren et d’Aix-la-Chapelle. Guillaume, neveu de Robert de Bétonne, était archidiacre de Liège et prévôt d’Aix-la-Chapelle, où il avait sa résidence.