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lui parler à voix très-basse et en essuyant de temps en temps une larme qui venait mouiller ses joues pâlies.

— Ô mon fidèle oiseau, lui disait-elle, avec une naïveté enfantine, je t’en prie ne sois pas triste ainsi : mon père ne nous a pas quittés pour toujours, j’ai adressé pour lui de ferventes prières à monseigneur saint Michel. Dieu est juste, vois-tu ! Dieu permettra qu’il échappe à la colère de la cruelle reine de Navarre ; nous le reverrons bientôt, ne te désole donc pas comme cela, mon faucon bien-aimé !

En parlant ainsi, la jeune fille versait des larmes abondantes. Bien que ses paroles fussent pleines de confiance et d’espoir, mais cet espoir n’était pas dans son cœur. Elle reprit cependant :

— Mon pauvre oiseau, tu n’iras plus chasser désormais dans les vallons qui avoisinent notre beau Wynendael. Wynendael n’est plus à nous, il appartient maintenant aux Français. Les méchants Français ont jeté en prison mon malheureux père et l’ont chargé de lourdes chaînes. En ce moment il gémit au fond d’un sombre cachot et Dieu seul sait si la reine Jeanne ne le fera pas mourir ! Ô mon oiseau chéri, nous aussi alors nous mourrons de douleur. Cette pensée, cette horrible pensée m’ôte à elle seule toute ma force. Repose-toi là, car ma main tremblante ne sait plus te porter…

L’enfant, au désespoir, s’affaissa épuisée dans son fauteuil ; sa pâleur, toutefois, n’augmenta pas, car depuis longtemps les roses de ses joues s’étaient tota-