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Et, à ce dernier mot, il tira son épée, la brisa en deux morceaux sur son genou et en lança les débris sur le parquet avec tant de violence, qu’ils rejaillirent jusque sur les marches du trône.

La fureur, le dépit et la colère de Jeanne ne connurent plus de bornes en entendant ces paroles ; le sang lui monta au visage, ses traits se bouleversèrent et perdirent toute expression humaine tant ils se défigurèrent par une affreuse contraction : elle resta clouée à sa place, on eût dit qu’une apoplexie venait de la frapper.

— Saisissez-le ! saisissez-le ! s’écria-t-elle. Les gardes qui se trouvaient dans la salle voulurent exécuter cet ordre et déjà leur chef s’approchait du comte de Valois ; mais le roi, qui portait à son frère la plus vive affection, défendit qu’on le touchât.

— Quiconque touche monseigneur de Valois, mourra aujourd’hui même ! s’écria-t-il.

À cette menace, les gardes restèrent immobile et le comte de Valois sortit librement de la salle, malgré les imprécations de la reine irritée.

Ainsi se termina cette scène violente. Guy fut retenu captif à Compiègne ; on emmena Robert à Bourges, dans le Berry, et son frère Guillaume à Rouen, en Normandie. Chacun des autres seigneurs flamands fut emprisonné dans une ville différente, de telle sorte que tous, captifs et isolés les uns des autres, ne pouvaient s’offrir aucune consolation.

Didier Devos fut le seul qui revint en Flandre,