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Le Bruxellois essaya de convaincre ses amis qu’on ne pouvait trouver rien de plus délicieux que le mets qu’il leur avait préparé. Le baron, le matelot et Jean Creps commencèrent en effet à en manger et assurèrent que Pardoes n’avait pas exagéré la bonne qualité de la chair d’ours : le dessous des pattes surtout était merveilleusement tendre et succulent.

Victor, quoiqu’il éprouvât quelque dégoût, se laissa vaincre et accepta une demi-patte des mains de Creps ; mais Donat lui prit le bras et voulut le retenir.

— Ah ! monsieur Roozeman, supplia-t-il, je vous en prie, ne mangez pas de cet horrible animal, il a voulu nous déchirer ; il a peut-être déjà mangé d’autres personnes.

— Mais, Kwik, tu es vraiment naïf, dit Victor avec un sourire, viande est viande, et celle-ci a bon goût et n’est pas nuisible…

— Pas nuisible ? répliqua Donat ! mangez-en, vous verrez. Sans le savoir, vous deviendrez méchant, et colérique, et cruel.