Page:Conrad - Gaspar Ruiz, trad. Néel.djvu/24

Cette page n’a pas encore été corrigée

Je suppose que la liberté de ses bras ajoutait à l’influence de sa force, je veux dire à l’influence spirituelle qu’exerce sur des gens ignorants une vigueur exceptionnelle. En réalité, il n’était pas plus redoutable qu’avant, à cause de l’engourdissement de ses bras et de ses mains, qui persista quelque temps.

Le sergent avait recouvré l’usage de la parole. — « Par tous les saints ! s’écria-t-il, il va falloir que nous fassions venir un cavalier avec son lasso, pour disposer de lui, si nous voulons l’emmener au poteau d’exécution. Il faut un bon enlazador, sur un fort cheval, pour en venir à bout. Votre Excellence a fait une belle folie ! »

Je ne trouvai rien à répondre. J’étais surpris moi-même, et j’éprouvais l’enfantine curiosité de voir ce qui allait arriver. Le sergent, lui, ne songeait qu’à la difficulté de maîtriser son prisonnier, quand l’heure serait venue de faire un exemple.

— « Nous allons être obligés de lui tirer dessus par la porte ouverte, dès qu’il voudra sortir », poursuivit-il d’un ton maussade. Il allait donner un nouveau cours à ses inquiétudes, touchant l’exécution correcte de la sentence, quand il s’interrompit, avec une exclamation soudaine, arracha un fusil à un soldat, et resta attentif, les yeux fixés sur la fenêtre.