lent tous deux, se sentant mal. Cloete de nouveau éclate de rire à l’idée que ce misérable Stafford puisse prétendre être pour quelque chose dans une affaire aussi désespérée… « Est-ce ainsi que vous croyez pouvoir me traiter maintenant ? » hurle l’autre tout à coup…
La mer vient frapper la coque, le bateau tremble et geint tout autour d’eux ; on entend le bruit des vagues, tout autour et au-dessus de leur tête. Cloete se sent troublé, et il entend l’autre crier comme un perdu : « Ah, vous ne me croyez pas ? Allez voir le câble de bâbord. Rompu ? Hein ? Allez voir s’il est rompu. Allez chercher la maille brisée. Je vous en défie. Il n’y a pas de maille brisée. Cela vaut mille livres pour moi. Pas moins. Le lendemain de notre débarquement, tout de suite — je n’ai pas l’intention d’attendre que le navire soit complètement brisé — je vais trouver les assureurs, quand je devrais marcher nu-pieds jusqu’à Londres. Le câble de bâbord. Regardez-le, que je leur dirai. Je l’ai faussé, pour le compte des armateurs, tenté par une crapule nommé Cloete. »
Cloete ne comprend pas exactement ce que tout cela signifie. Tout ce qu’il voit, c’est que l’homme a l’intention de faire du grabuge. Il prévoit quelque ennui… « Est-ce que vous croyez me faire peur, demande-t-il, à crier ainsi comme un putois ?… » Et Stafford le dévisage ; tous deux se tiennent à la table de la cabine. « Ah ! nom de Dieu, non, vous, vous n’êtes qu’un sacré voyou ; je peux faire peur à l’autre, le type en redingote… »
Il entendait par là George Dunbar. À cette idée, Cloete sent que la tête lui tourne ; non pas qu’il croit l’homme capable de faire vraiment du mal, mais il sait comment est George ; il mettra toute l’affaire par terre. Fichue toute l’affaire qu’il avait tellement prise à cœur ! Il ne dit rien ; il écoute l’autre, qui, au milieu de la panique, de la terreur, de l’énervement, halète comme un chien… « Aboulez mille livres, vingt-quatre heures après le débarquement, après-demain. C’est mon dernier mot, M. Cloete. » « Mille livres après demain, dit Cloete. Oui. Et aujourd’hui prenez toujours ça, sale bête !… » Et il lui donne un coup de poing droit dans la figure d’un mouvement de rage, rien d’autre. Stafford s’en va s’aplatir sur la cloison. Et voyant cela, Cloete s’avance d’un pas et lui envoie un autre coup quelque part dans la mâchoire. L’homme vacille et s’en va tomber en arrière dans la cabine du capitaine dont la porte était ouverte. Cloete l’entend tomber lourdement par terre et rouler sous le vent, alors il claque la porte et tourne la clef… » Voilà, se dit-il, qui vous empêchera de nous embêter. »