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SUR LA PRÉSENTE EDITION.


nuscrit B ne saurait être rattaché à la famille du manuscrit A, et que si un éditeur eût entrepris de le publier, il eût ajouté un quatrième Ville-Hardouin à ceux que nous possédons déjà.

Celui de M. Buchon a pour type une troisième famille, à laquelle appartiennent les manuscrits C, D, E. Le dernier, qui est resté inédit, est tout au plus de la fin du quinzième siècle, et ne saurait par conséquent avoir une grande importance ; le second peut remonter jusqu’à la fin du treizième, et le premier se place à une date à peu près intermédiaire. Ces trois manuscrits, abstraction faite de quelques différences d’un ordre secondaire, offrent des traits de ressemblance tout à fait caractéristiques, attendu qu’on y trouve des séries identiques de lacunes, de phrases abrégées et de synonymes, dans des passages nombreux, autres que ceux où ces mêmes défauts altèrent le texte du manuscrit B. Quant à l’orthographe, elle a pris les formes du dialecte picard ou flamand, qui diffère essentiellement du dialecte champenois. A tout prendre pourtant, le Ville-Hardouin que nous a transmis cette troisième famille de manuscrits est préférable à celui du manuscrit B.

Le moins ressemblant de tous serait, sans contredit, celui du manuscrit F, qui constitue à lui seul une quatrième et dernière famille. Celui-là est resté en grande partie inédit, parce que M. Paulin Paris, tout en déclarant qu’il le préfère aux autres, ne s’est pas cru obligé de lui rester toujours fidèle ; il a au contraire recouru souvent au manuscrit D, dont les défauts deviennent excusables quand on les compare aux vices du manuscrit F. Une seule chose serait à préférer dans ce dernier manuscrit, ce serait la langue, qui pourrait appartenir à l’Ile-de-France, et qui en tout cas s’éloigne beaucoup moins de celle de la Champagne que le dialecte picard de la troisième famille.

Si je me suis bien expliqué, le lecteur aura compris que les trois dernières familles se distinguent entre elles par des retranchements volontaires et des synonymes qui altèrent le texte d’une façon particulière à chacune d’elles, en sorte qu’on y remarque un certain nombre de’défauts qui, tout en étant de même nature, s’appliquent à des passages différents. Je dois ajouter maintenant qu’il y a en outre certaines lacunes, certains retranchements et certains synonymes qu’on retrouve identiquement dans ces trois familles, et en nombre assez considérable pour accuser l’existence d’un texte antérieur d’où elles dérivent. Ce texte antérieur, qui ne s’est pas conservé jusqu’à nous dans un manuscrit qui lui soit propre, pouvait être, relativement au manuscrit primitif, souche