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PRÉFACE


personne nous est moins connue. Sur la foi de Du Cange, le plus illustre de ses éditeurs, on s’est accordé pendant longtemps à lui donner pour père un seigneur du nom de Guillaume, qui Jigure dans les chartes du comte Henri le Libéral, de 1163 à 1179, avec le titre de maréchal de Champagne. Guillaume était mort vers 1180, et l’on savait que l’existence du fils illustre qu’on lui attribuait se termina de 1212 à 1218. Du père au fils l’intervalle était convenable, et le titre de maréchal, qu’ils avaient porté successivement, ne pouvait être (on le croyait du moins) qu’un fief héréditaire. Mais, de nos jours, le savant historien des comtes de Champagne, M. d’Arbois de Jubainville, a démontré que ce Guillaume, surnommé le Roi, fut la tige d’une autre famille, de celle des le Brebant de Provins, et probablement l’aïeul du Milon le Brebant dont Ville-Hardouin parle en plus d’un passage de son histoire. Notre grand historien n’a donc pas de généalogie ; heureusement pour lui, il est de ceux qui peuvent s’en passer.

Il naquit vraisemblablement dans le château dont quelques vestiges subsistent encore au petit village de Ville-Hardouin, dans l’arrondissement de Troyes ; mais on ignore en quelle année. M. d’Arbois de Jubainville a rencontré son nom pour la première fois dans deux chartes de Marie, comtesse de Champagne, datées de l’an 1185. On en peut conclure qu’il avait dès lors atteint l’âge de la majorité, et que, par conséquent, il était né au plus tard en 1164.

Le même savant a bien voulu me signaler un autre fait dont il faut tenir grand compte, quand on recherche la date probable de la naissance de Ville-Hardouin. Geoffroi de Ville-Hardouin, prince d’Achaïe, neveu de l’historien, avait pour fils un autre Geoffroi, qui scellait avec son père une charte donnée à Corinthe en 1216. Ce fils était donc déjà majeur, en sorte que le prince d’Achaïe ne pouvait avoir moins de quarante-trois ans. Donc le père de ce prince d’Achaïe, c’est-à-dire le frère de notre Ville-Hardouin, en aurait eu au moins soixante-cinq.