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Discours de Mme Griess-Traut sur la machine à coudre


Mesdames, Messieurs,

Notre parlement français, préoccupé à juste titre du faible accroissement des naissances en France, comparé à celui de la plupart des nations qui nous environnent, vota, dans une de ses dernières sessions, une prime en argent à allouer à chaque famille pour la naissance de son septième enfant.

Nous ne saurions trop applaudir au sentiment patriotique qui dicta ce vote généreux. Mais, revenu au calme, par la supputation tardive du chiffre nécessaire à l’application de cette loi, on s’aperçut que la somme s’élèverait au chiffre respectable de 40 millions. Dès lors, le sort de cette loi fut fixé. Elle passa à l’état de lettre morte.

Le travail que je présente a pour but, non seulement d’attirer l’attention publique et celle du Gouvernement sur d’immenses misères, d’en signaler la source principale, le remède possible, mais aussi de montrer la solidarité étroite qui existe entre la question économique du travail des femmes (d’une catégorie surtout) et le faible chiffre des naissances dont on se plaint, parce qu’il se rattache aux intérêts de la patrie.

Les ouvrières dont je veux parler sont celles qui sont employées spécialement à la machine à coudre à pédale. Cette machine occupe le nombre considérable de cent cinquante mille environ, à Paris seulement !… Par les effets désastreux qu’elle exerce sur les conditions hygiéniques des ouvrières, elle a une influence incontestable sur le chiffre des naissances… Dans notre capitale industrieuse et lumineuse, cette industrie est, parmi celles qui emploient particulièrement des jeunes filles et des jeunes femmes, la plus vaste, comme elle est aussi la plus meurtrière… Ce sont de véritables hécatombes de jeunes filles et de jeunes femmes, dues à la machine à pédale.

Elle est une source de désordres organiques dans l’économie de la femme par suite de l’ébranlement permanent causé par la trépidation du pied sur la pédale.

C’est une question essentiellement d’hygiène industrielle compliquée d’un haut intérêt national : le dépeuplement de la France !

Le mal est profond, car il s’agit, non pas de quelques centaines de jeunes filles et jeunes femmes, mais de milliers, que