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sur les épaules, qui est de ces étoffes de coton blanc rayé de bleu.

Pour l’autre figure qui tient les pieds du Christ, et qui porte ombre sur son corps, elle est vêtue de vert. La Vierge est couverte d’un manteau bleu, et, bien qu’elle ne soit vue que de profil, on ne laisse pas de remarquer sur son visage les effets d’une douleur excessive.

La Madeleine est agitée de deux passions violentes qui la font souffrir avec beaucoup d’effort ; car il paroît qu’elle ressent dans le fond de son âme une vive douleur de la mort du Sauveur qu’elle regarde avec des yeux où tout ce qu’elle a de vie semble être ramassé, comme si son âme vouloit sortir par là pour suivre dans le sépulcre ce divin objet de son amour. Mais la tendresse et la compassion qu’elle a pour la mère de cet époux bien-aimé la retiennent auprès d’elle, afin de l’assister, de sorte que si elle suit et accompagne des yeux et de l’esprit le corps que l’on porte au tombeau, l’on voit que d’ailleurs elle est attachée auprès de cette mère affligée qu’elle embrasse et qu’elle soutient, craignant qu’elle ne tombe de foiblesse.

Les sentiments de saint Jean étant semblables à ceux de la Madeleine, on connoît bien à la tristesse qui est peinte sur son visage qu’il a le cœur percé d’une pareille douleur. Il est fort occupé à porter le corps de son divin Maître ; cependant il détourne ses yeux pour regarder la Vierge, dont les maux augmentent encore les siens et lui causent une nouvelle affliction.

Il ne paroit pas sur les visages de Nicodème et de Joseph d’Arimathie une douleur si violente ; aussi n’avoient-ils pas reçu de ce divin Sauveur de si forts témoignages d’amour et de tendresse comme saint Jean et la Madeleine. Toutefois on ne laisse pas de voir en eux beaucoup de tristesse, et l’on remarque que c’est avec un zèle et une affection pleine de respect qu’ils tâchent de rendre à ce corps les derniers devoirs de la sépulture.

M. de Champaigne fit encore plusieurs remarques sur les autres parties de ce tableau, s’arrêtant à cette beauté de teintes qui paroît dans les carnations, à ces dispositions de couleurs si bien mises les unes auprès des autres dans les draperies,